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"Baudelaire y su musa", Armand Rassenfosse. 1920. |
HIMNO A LA BELLEZA
¿Vienes del cielo profundo o surges del abismo
oh, Belleza? Tu mirada, infernal y divina,
vierte confusamente el favor y el crimen,
y se puede, por esto, compararte al vino.
Contienes en tu ojo el poniente y la aurora;
derramas perfumes como un anochecer tormentoso;
tus besos son un filtro y tu boca un ánfora
que hacen al héroe cobarde y al niño valiente.
¿Sales de la sima negra o desciendes de los astros?
El destino hechizado sigue tus enaguas como un perro;
siembras al azar la alegría y los desastres,
y lo gobiernas todo y no respondes de nada.
Marchas sobre los muertos, Belleza, de los que te burlas;
de tus joyas el Horror no es la menos encantadora,
y la Muerte, entre tus más queridos dijes
sobre tu vientre orgulloso danza amorosamente.
El efímero deslumhrado vuela hacia ti, candela,
crepita, arde y dice: ¡Bendigamos estas luces!
El amante jadeando inclinado sobre su bella
tiene el aspecto de un moribundo acariciando su tumba.
Que vengas del cielo o del infierno, ¿qué importa,
¡oh, Belleza! ¡monstruo enorme, horroroso e ingenuo!
si tu mirar, tu sonrisa, tu pie, me abren la puerta
de un Infinito que amo y nunca he conocido?
De Satán o de Dios, ¿qué importa? Angel o Sirena,
¿qué importa, si tú vuelves, —¡hada de los ojos de terciopelo,
ritmo, perfume, luz, oh, mi única reina!—
el universo menos horrible y los instantes menos pesados?
HYMNE A LA BEAUTÉ
Viens-tu du ciel profond ou sors-tu de l'abîme,
O Beauté? Ton regard, infernal et divin,
Verse confusément le bienfait et le crime,
Et l'on peut pour cela te comparer au vin.
Tu contiens dans ton œil le couchant et l'aurore;
Tu répands des parfums comme un soir orageux;
Tes baisers sont un philtre et ta bouche une amphore
Qui font le héros lâche et l'enfant courageux.
Sors-tu du gouffre noir ou descends-tu des astres?
Le Destin charmé suit tes jupons comme un chien;
Tu sèmes au hasard la joie et les désastres,
Et tu gouvernes tout et ne réponds de rien.
Tu marches sur des morts, Beauté, dont tu te moques;
De tes bijoux l'Horreur n'est pas le moins charmant,
Et le Meurtre, parmi tes plus chères breloques,
Sur ton ventre orgueilleux danse amoureusement.
L'éphémère ébloui vole vers toi, chandelle,
Crépite, flambe et dit: Bénissons ce flambeau!
L'amoureux pantelant incliné sur sa belle
A l'air d'un moribond caressant son tombeau.
Que tu viennes du ciel ou de l'enfer, qu'importe,
O Beauté! monstre énorme, effrayant, ingénu!
Si ton œil, ton souris, ton pied, m'ouvrent la porte
D'un Infini que j'aime l'ai jamais connu?
De Satan ou de Dieu, qu'importe? Ange ou Sirène,
Qu'importe, si tu rends, — fée aux yeux de velours,
Rythme, parfum, lueur, ô mon unique reine!—
L'univers moins hideux et les instants moins lourds?